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La mort, la fragilité, la guerre: réflexions sur des thématiques de de Bruyckere

Date et heure
Jeudi 13 octobre 2011

La mort, la fragilité, la guerre: réflexions sur des thématiques de de Bruyckere

Les œuvres de Berlinde De Bruyckere amènent beaucoup de questions et de réflexions sur des thématiques peu évidentes: la mort, la fragilité, la guerre. Les formes sculpturales et les installations prenantes qu’elle propose ont, et tous les visiteurs sont d’accord là-dessus, quelque chose de viscéral. Elles font surgir des émotions très profondes, que ce soit le dégoût, le malaise, une empathie, une certaine souffrance ou une tension. Toujours est-il qu’elles ne laissent personne indifférent.

Son inspiration, pour créer de telles œuvres, provient de diverses sources. Il faut d’abord remonter dans son enfance pour y saisir l’essence de cette fascination pour la chair. En effet, son père exerçait la profession de boucher. Morceaux de viande, chairs suspendues, on retrouve cette façon de disposer les corps dans le travail de Bruyckere. Elle exécute d’ailleurs ses œuvres à partir de différents moulages de corps humains, c’est-à-dire  jamais un seul et même corps, ce qui donne des entités complètement morcelées, fragmentées. Elle part d’abord du socle: crochets, échafauds, vitrines pour débuter sa réflexion. De là naissent des formes, prennent vie les êtres de chair de l’artiste.

Elle a aussi reçu une éducation catholique très stricte. Les images d’icônes religieuses ont donc bercé son enfance et cette influence se retrouve assurément dans les positions physiques qu’elle donne à ses personnages qui rappellent, entre autres, des martyrs: corps voûtés, recroquevillés, prostrés. On évoque souvent la crucifixion dans ses œuvres plus récentes et c’est une forme qu’elle avoue d’emblée avoir exploitée. Le corps est vraisemblablement une entité qui lui parle, qu’il soit humain, animal ou végétal.

Enfin, elle affirme avoir toujours en tête le retable d’Issenheim de Grunewald lorsqu’elle commence une œuvre. Meuble tridimensionnel qui contient des représentations religieuses à la fois peintes et sculptées, celles-ci ne sont d’ailleurs pas sans rappeler l’utilisation qu’elle fait elle-même des vitrines où sont nichés des êtres singuliers, métamorphosés et qui évoquent des mondes apocalyptiques.

Berlinde De Bruyckere’s thought-provoking works raise many questions about themes such as death, fragility and war. The sculptural forms and gripping installations she creates have a visceral quality that illicit reactions of repulsion, unease, empathy and suffering leaving no one indifferent.

De Bruyckere’s inspirations are many. Her fascination with flesh can be traced back to her childhood as her father was a butcher. It is possible to see the echo of his trade in how she builds her works. She uses a variety of casts from different human bodies which creates fragmented entities. As Her thought process builds, she adds hooks, scaffolds and showcases. From there shapes come to life and the artist’s fleshy beings take form.

Having received a strict Catholic education, religious icons and narratives influence her art, whether is be through the martyr-like positions given to her figures (shrivelled, vaulted or prostrate bodies) or the recurring theme of crucifixion, which De Bruyckere admits having exploited in her recent works. The body speaks to her, be it human, animal or vegetal.

Berlinde De Bruyckere has said that she always begins a piece with Grunewald’s Isenheim Altarpiece in mind. Matthias Grunewald’s work is a display of painted and sculpted religious representations, which is present in De Bruyckere’s use of showcases. She uses similar vessels in which singular, metamorphosed beings that evoke apocalyptic worlds are placed.

Myriam Daguzan Bernier

Photo:
Invisible beauty and invisible love II
, 2011
Cire, résine, époxyde, bois, fer, cuir, laine, corde en crin de cheval
Avec la permission de l’artiste, de Hauser & Wirth et de la Galleria Continua / Courtesy of the Artist, Hauser & Wirth and Galleria Continua
Photo: Mirjam Devriendt

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