L'outil Bill Viola: Mouvements est conçu par l'équipe de DHC/ART Éducation afin d'encourager les visiteurs à développer en profondeur certains concepts clés explorés par l'exposition Bill Viola: Naissance à rebours.

Contenu: Matérialité

Il va sans dire que les œuvres à grande échelle de Bill Viola—et la puissance qui en émane—suscitent réflexion et contemplation. Elles entraînent une expérience spirituelle et transcendante, qui va au-delà des limites du corps. En même temps, leur forte présence nous ramène à ce dernier, provoquant une réaction viscérale. Nous reprenons conscience de notre corps qui partage l’espace avec d’autres corps, de notre physicalité, de notre peau, sa sensibilité, de notre sens du toucher—et du poids que les sujets de Viola parviennent à endurer. Mais le déluge dans Inverted Birth (2014) est à rebours: c’est une averse ascendante qui évoque cette idée que le cycle de la vie ne commence pas nécessairement à la naissance pour se terminer par la mort. Viola décrit Inverted Birth comme représentant «cinq étapes de l’éveil» [1], qui sont symbolisées par des éléments physiques qui constituent nos vies: la terre, le sang, le lait, l’eau et l’air.

Les réflexions et les réactions abondent lorsque nous expérimentons Inverted Birth. Comprendre le sens de celles-ci de manière séquentielle n’est pas une tâche facile. Peut-être que la seule façon de faire consiste plutôt à briser la linéarité pour permettre des fluctuations, qui peuvent être copiées et collées, éditées et effacées. Une subversion pour ainsi dire, plutôt qu’une inversion, du texte ordonné. Non pas une introduction, un corps de texte, puis une conclusion. Seulement des mots, jaillissant de nos sens.

En voici quelques-uns:

- Une série de passages à travers divers états d’être, en attention, en éveil, osciller d’un état à l’autre, de manière fluide—la violence, ainsi que la beauté, de tout cela.
- La matérialité d’une oeuvre vidéo, qui nous transmet une performance, inatteignable en réalité, et pourtant en laquelle nous nous reconnaissons, à plusieurs niveaux.
- La présence du travail, se reconnaître dans quelque chose que nous pouvons tous imaginer avoir déjà ressenti, de manière somatique.
- Le corps et tout ce qu’il peut supporter, survivre, surmonter, expérimenter, accueillir.
- La patience du regardeur. Le travail se déploie lentement. Il prend son temps.
- Le temps, immatériel, mais pourtant si tangible dans les œuvres au ralenti… Nous nous accrochons à ce temps alors que nous regardons ce processus avoir cours, lentement, devant nous.
- Un mouvement contre nature de l’eau, un déluge à rebours, défiant la gravité.
- Le surnaturel.
- L’idée d’un cycle—naissance et mort et renaissance—plutôt que le début et la fin d’un système linéaire.

Notez quelques-unes de vos réflexions au sujet d’une autre oeuvre de Viola. Que remarquez-vous après avoir fait cet exercice? Comment avez-vous organisé vos pensées? Comment l’expérience de faire cette liste a-t-elle affecté votre manière de vivre l’oeuvre?

De quelle manière oscillez-vous entre le matériel et le spirituel lorsque vous faites l’expérience des œuvres de Viola? Sentez-vous que ces deux dimensions sont en opposition ou plutôt qu’elles cohabitent harmonieusement?

Amanda Beattie
DHC/ART Éducation

[1] HANHARDT, John G. (2015). «2000s: A Humanism for Our Times». Bill Viola. Paris: Réunion des musées nationaux, pp. 239.

Photo: Bill Viola, Inverted Birth, 2014. Avec l’aimable permission de l'artiste.